Je
ne retournerai jamais plus à Kipedo, à la saison
des pluies. Le herbes sont trop hautes, les animaux trop rares.
Je ne retournerai jamais plus à Kipedo, à la
saison des pluies. Les routes sont mauvaises, les souvenirs
s'enlisent.
Je ne chercherai jamais plus à revoir Kipedo. Je veux
garder mes souvenirs enfouis dans leur écrin sauvage.
Entre ce ciel immense et ces herbes tendues à se rompre,
j'ai rêvé d'un bonheur. Sur le chemin qui nous
menait à Kananarok a surgi un obstacle, comme au fil
de la vie surviennent les épreuves.
Arbre couché en travers de la route, décès
qui nous frappe, tronc que l'on contourne en foulant les herbages,
problèmes qui nous viennent et que nous esquivons se
ressemblent étrangement.
Les sources de lumière, les objets et leurs ombres
habitent notre univers. En traversant la vie, nous choisissons
des matériaux, des fils et des couleurs. La navette
va et vient, inlassablement poursuit sa trame. Pourtant, des
reflets tristes se marquent dans l'étoffe. Le voyage
laisse la porte ouverte à l'imprévu.
Comme dans un film, un arbre couché en travers de
la route, un guide vêtu d'un uniforme kaki bien amidonné,
un fusil cognant contre la vitre, un nez écrasé
au milieu d'une face patibulaire, me rappelèrent que
nous étions sur cette piste de latérite.
Les portes claquèrent. Jochen alla explorer le terrain.
Puis, nous descendîmes tous pour alléger le véhicule.
Je pris le volant et lançai la voiture sur l'accotement,
au milieu des herbes. Nous nous retrouvâmes quelques
mètres plus loin, l'obstacle franchi.
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