Avec
quelques amis, nous avions décidé
de faire en Chine notre dernier voyage du millénaire.
Après beaucoup d'étés
et d'hivers passés à bourlinguer
en Afrique, nous nous attendions bien à
quelques surprises.
La formule? En routards, nous
avions préparé un itinéraire
de quatre semaines à parcourir sac au dos.
Seuls quelques vols intérieurs et les longs
trajets en train avaient été réservés.
Nous atterrissons à Shanghai,
en pleine ville pour ainsi dire. Pourtant, le
trajet en bus pour atteindre le centre est interminable.
On ne peut s'empêcher de penser à
New York, ce sont comme plusieurs Manhattan juxtaposés.
Ici, un pâté de maisons en cours
de démolition; là, des immeubles
à appartements qui poussent comme des champignons.
Des échafaudages de bambou s'élancent
vers le ciel, recouvrant les édifices comme
du lierre. (Notre guide indique que l'habitant
moyen ne dispose que de 8 m2 à Shanghai,
ce qui explique cette effervescence de la construction).
Les vélos vont et viennent,
inlassablement. Ils se dépassent, se croisent,
se chevauchent, s'emberlificotent... Humains ou
caravanes de fourmis jaunes?
En plusieurs endroits, nous sommes
bousculés par l'agitation de la foule.
Sur le Bund, promenade longeant la rivière
Huangpu, le pouls de la ville a la force de l'ébullition.
Un peu comme si toute la Belgique se promenait
sur la digue d'Ostende...
Une jeune-fille d'environ 16
ans s'approche de moi. Dans un anglais d'Oxford
assaisonné de sauce asiatique, elle me
demande: "Puis-je vous poser quelques questions?
My name is Edith. D'où venez-vous? Comment
vous appelez-vous?" Ai-je suscité un coup
de foudre? Non, tout simplement cette jeune-fille
voit en l'Occidental le moyen de pratiquer l'anglais!
Comme 100 millions de jeunes Chinoises, elle est
impeccablement habillée. Ses cheveux sont
noués en couettes. Elle porte un T-shirt
ras de cou qui ne laisse rien deviner de sa poitrine
car toute forme est gommée, écrasée.
Sous sa très petite mini-jupe, des panties,
malgré la chaleur et la moiteur de l'été,
et... des souliers vernis. Adorable jeune-fille,
c'est plutôt à Genève ou à
Nantucket que je me serais attendu à vous
rencontrer!
Au Nanjin hôtel, deux Chinoises
en 'livrée', gantées de blanc nous
ouvrent les portes à chacun de nos passages.
Encore des créatures sorties d'un conte
de fées? Dans cet hôtel, je ne parviendrai
pas, à l'heure du petit déjeûner,
à commander un thé 'normal' et un
déjeûner 'continental'. J'en serai
réduit à un potage tiède
aux boulettes de riz aggloméré...
Après quoi j'irai flâner de l'autre
côté de la rue, dans la Chine éternelle,
où l'on vend les grenouilles vivantes.
D'abord pesées dans un sachet de plastique,
elles seront ensuite décapitées,
dépiautées et jetées dans
la casserole, toutes gesticulantes encore!!!
Shanghai est une métropole
de 8 millions d'habitants. Mais la Chine compte
des dizaines de villes d'une taille supérieure
à celle de Bruxelles...
Une amie professeur d'anglais
nous accompagne. Elle a étudié la
langue chinoise pendant 2 ans et a déjà
voyagé 4 fois en Chine. Munie de ce bagage
et de son expérience, elle tente d'établir
un dialogue. Mais le chinois est extrêmement
difficile à lire, à écrire
ainsi qu'à parler. Il y a une infinité
de nuances dans la prononciation et les intonations.
Quand elle semble se faire comprendre, elle ne
parvient que rarement à saisir les réponses.
Aussi, au restaurant, s'avèrera-t-il rapidement
plus efficace de jeter un coup d'œil sur ce qui
est servi aux tables voisines, d'aller soi-même
à la cuisine pour y imiter le cri de la
poule, voire de casser les œufs et de faire l'omelette
soi-même... Oui, c'est admis dans ce pays!
Si les Chinois nous surprennent,
nous les étonnons également. A plusieurs
reprises, on me met un jeune enfant dans les bras
en me demandant si j'accepte de poser pour une
photo. Un peu comme les gosses de chez nous, photographiés
sur les genoux de Saint-Nicolas. Nous provoquons
des applaudissements lorsque, dans un petit patelin,
nous décidons de pousser une tête
dans une soirée dansante 'à l'occidentale'.
Les Chinois sont sympathiques
et se montrent le plus souvent prêts à
aider les touristes en difficulté. (Ceci
n'était pas du tout le cas il y a quelques
années encore, semble-t-il). Mais la Chine,
ce sont aussi des petits villages lovés
dans les montagnes, où les rizières
s'étagent à perte de vue. La Chine,
ce sont aussi de vieilles demeures dans lesquelles
des bonzaïs vieillissent tranquillement.
La Chine, ce sont aussi des pins perdus dans les
brumes accrochées aux sommets des montagnes...
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