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Mana Hoanaé
(à prononcer Mana Honé)
Madagascar, Bonjour….
Elle a 23 ans et ses cheveux noirs se referment,
telles deux parenthèses, de part et d’autre
de son visage. A Madagascar, je n’ai pas
croisé de filles beaucoup plus belles qu’elle
!
Elle sera mon guide pendant quatre semaines pour
visiter ce fabuleux pays.
Une carte est dépliée sur la table,
à la lueur de deux bougies. Je la laisse
parler :
« Nous avons vécu là, durant
notre jeunesse », me dit-elle….
« Regarde, là, c’est cette
rivière qui a donné le nom à
notre région et à notre village
».
« C’est dans ce village là,
qu’est mon origine. »
« Chez nous on parle tsimihety qui est la
langue de notre tribu.
C’est dans mon village paternel que l’on
se reposera… que nous tous reposerons plus
tard »
« Je suis née au sud-ouest de Tananarive.
Tu m’écoutes…
Je marchais encore à quatre pattes quand
mes parents sont partis dans la brousse, à
Antsohyhi, pour le service de la gendarmerie.
Je suis l’avant-dernière fille d’une
famille de 9 enfants. J’ai perdu mes deux
parents quand j’avais quatre ans et j’ai
été élevée par une
tante, avec mes deux sœurs.
Les enfants malgaches sont enterrés auprès
de leurs parents, dans le village de leur naissance
et si la famille n’a pas assez d’argent,
ou pas le temps, pour le transport du corps, on
fait un enterrement provisoire. Tu m’écoutes
? Le corps peut rester ainsi longtemps, dans le
cercueil, avant la fête… »
« On ne doit pas pleurer les morts agés,
on fait la fête, et selon les familles cela
prend plus ou moins de temps. Parfois une semaine.
On dépense beaucoup d’argent, on
fait une grande cérémonie. Ce n’est
pas triste.
Il n’est pas rare que tout le troupeau de
zébus du propriétaire décédé
soit sacrifié pour la fête. Tout
le village et les amis sont invités.
Mais maintenant c’est la saison des «
déterrements ». On ne fait pas les
déterrements n’importe quand. On
les fait en hivers pendant la période sèche
».
En effet, à l’approche de Tananarive,
lors de notre retour, nous voyons beaucoup de
monde rassemblé autour de tombes, entendons
de la musique, et pouvons observer les habits
très colorés des villageois.
« Quand on est dans la capitale on ne voit
pas souvent cela parce qu’à Tananarive
on est presque civilisé…A Madagascar
il y a des tas de sortes d’enterrements.
Je t’assure. « J’ai vu ça
dans mes yeux !». Tu m’écoutes…?
Chacun a sa manière de vivre. Chaque village
est un petit royaume. Il y a différentes
façons d’enterrer la mort. Parfois,
c’est entre des rochers, dans la montagne
(et cela me fait penser aux Dogons du Mali) mais,
poursuit-elle, le tombeau devrait avoir la forme
d’une maison typiquement malgache, et être
bien orienté. Dans les tombeaux il y a
un classement des morts…l’ancêtre,
ses enfants morts, et puis les générations
suivantes.
Après le déterrement, chaque os
du corps sec est emballé séparément,
et, le tout, le corps sec, est mis dans une tombe
à l’extérieur du village,
sur une colline, par exemple »
Souvent elle me parle du corps sec par opposition
au corps humide, fraîchement enterré.
Elle poursuit en me disant :
« Un être humain, pour être
considéré comme être humain,
doit avoir des dents et des os durs, sinon il
n’est pas considéré comme
un humain et n’est pas enterré dans
un tombeau malgache… Les bébés
qui n’ont pas encore de dents sont enterrés
dans des endroits humides, comme des marécages,
ar exemple…»
Suite....
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