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Madagascar décembre 2005 – janvier 2006

Un castor à Madagascar est plus intéressant qu’un lémurien sur un arbre !

Je voulais revoir Madagascar. Aller au nord, là où je n'avais encore jamais été. Fin décembre, début janvier, c'est la saison des pluies. Les premières pluies rendent les routes impraticables et, à part quelques camions, hauts sur pattes, rien ne transite. Sur les pistes, chaque passage de poids lourds approfondit les traces des véhicules. Que faire avec une voiture comme notre Suzuki d'il y a six mois ?

J'insiste auprès des loueurs de quatre fois quatre mais rien n'y fait. Et cela s'aggrave encore davantage quand je précise que c'est le nord que je veux « faire ». Je me rends rapidement compte que ceux qui disent "oui" ne connaissent pas exactement l'état des routes ou promettent car une fois que nous serons face à l'obstacle ils pourront dire "qu’à l'impossible nul n'est tenu..." Le client est enferré dans sa propre insistance et décision. .

Castor, que je retrouve pour ce nouveau voyage, est toute souriante, et prête à affronter les plus grandes difficultés.

A l'hôtel on se penche sur les plans et les guides...que décider ?

Le sud, je le connais pour l'avoir parcouru il y a six mois. Et c'était limite pour notre petite voiture qui parvenait quand même à passer sable et flaques...

Tananarive, ville lumière, attire vers elle un quart de la population. Mais les chiffres varient beaucoup d'un dire à l'autre. Rien ne change vraiment dans un pays aussi endémiquement pauvre.

Salaire de base, me dit- on 50 euros pas mois.
Encore faut-il avoir du travail. Le taux de chômage avoisine les 70 pour cent ! Pour la population, la vie est chère, même si l'on fait attention à chaque centime dépensé.

A l'hôtel, "La Ribaudière", où je commence à connaître le patron, l'accueil est exceptionnel. Le nom de l’hôtel me fait penser à une destination plus lointaine encore...
Est-ce le nom d'un vaisseau qui accosta aux Marquises… ou plus loin ?
Ou le nom d'un vaisseau fantôme qui sortirait de l'opéra de Wagner ?

Je suis appelé ici VAZAH, ou beau Vasah, ce qui veut dire « à la peau blanche et claire », mais très certainement "riche". Etranger venu d'ailleurs… friqué… à harponner...

Toutes les filles un peu évoluées qui connaissent le français chassent le VAZAH.
Pourquoi se voiler la face quand "c'est comme cela". Cela s’observe dans les cyber-cafés où les filles sont studieusement alignées en rangées ou en cercles... en attendant que les lignes téléphoniques accélèrent leur débit. Il n’est pas rare qu’en une heure on ne puisse lire qu’un ou deux mails…Que du temps perdu !

Inutile d'insister sur le fait que dans les hôtels, ou en tous lieux, les hommes seuls sont épiés... « C'est comme ça". Puis-je vous accompagner... pour une nuit... une semaine... ou toujours.
Les robes proprettes des serveuses des restaurants chics s'ennuient de la pauvreté quotidienne. Elles servent les clients, sont bien habillées, mais vivent dans des taudis… boueux à la saison des pluies.
Et pour un peu d'argent pourquoi ne pas tenter sa chance... que ce soit un gros, un vieux ou un grincheux. C'est pour sortir "à tout prix" de cette misère que l'on tente sa chance, et, en route, pour Paris, ou une métropole quelconque…

Mais à Tananarive il n'y a pas de prostitution ostensible comme à Adis Abeba ou à La Havane où les filles venaient frapper à la fenêtre du restaurant dans lequel je déjeunais paisiblement avec mon épouse, pour m’inviter à les accompagner.

Pour choisir le destin nous prenons la route de l'est où parait-il tout est idyllique...
Derrière cette côte se cache l’île "Sainte Marie" mais aussi des îles plus lointaines comme Maurice et la Réunion... De quoi rêver quelques instants en attendant ce nord où il pleut toujours.

Voiture louée, sans chauffeur, et nous voilà partis, cahotant, sur cette route qui traverse en serpentant les petits villages sans électricité. On va chercher l'eau au puits du village…et essaie de s’informer quant à la distribution d’électricité.

GSM à charger, glaçons à demander aux riches commerçants des villages qui ont des réfrigérateurs à pétrole...pour garder l’insuline à basse température…

Rien n'a été réservé, nous allons là où le vent nous pousse. Pour pallier au manque de vivres nous avons fait quelques provisions de bouche et avons acheté ce qui nous permettra d'améliorer le quotidien. Nous allons dans des petits hôtels, à plus ou moins 8 euros la nuit.

Castor s'occupe des paiements ...Des anciens C.F.A., ou des Ariery, ou des euros, que l’on essaie de convertir mentalement tant bien que mal.
Je demande à Castor combien coûte ce petit pain macaron ? Elle me dit : zéro virgule zéro zéro zéro euro… je ne sais plus compter, c’est trop petit !

La Saison des Pluies aurait écrit… Graham Greene...
Le Sortilège Malais...Sommerset Maugham...
et, peut-être
Les Neiges du Kilimandjaro... Hemingway

C'est un peu de tout ceci et de tout cela qui me revient à l'esprit quand je regarde les paysages défiler...paysages tropicaux, chargés de terres rouges...lavées par les pluies tropicales...et ornés de cette végétation luxuriante faite de mille feuilles qui transpirent la pluie.

J'aime les jeunes de ces pays qui me font oublier mon père, l'âge avançant...
J'aime l'impromptitude du hasard qui dessine l'espace ou j'avance.
J'aime l'océan qui se referme sur les récifs, les emprisonnent et les usent,
et invite à penser que, quoi que nous croyons, rien n'est jamais achevé.

J'aime ma solitude au milieu du monde.

Il faudra encore, que dans ce monde, on m'explique qui je suis....
Entretien avec Castor…


Je vivais dans le nord du pays, bien au nord de la capitale, dans un village entouré de montagnes. C’était le village de mon enfance. Durant ma vie quotidienne tout me paraissait heureux. Le matin, lorsque sonnait la cloche de l’église, je me levais. J’allumais le feu de bois, à la cuisine, pour préparer la soupe au riz, c’est le petit-déjeuner traditionnel malgache. Je prenais le seau pour aller cherche l’eau au puits à une demi heure de marche. Parfois je devais attendre car il y avait la file au puits. Je rentrais le seau sur la tête et parfois encore un récipient au bras. C’était très dur. J’allais à l’école à pied, chez les sœurs. De 7h30 à 11h30. Je leur dois une fière chandelle. C’était loin mais elles ont fait toute mon éducation et le tout était gratuit. Depuis le jardin d’enfant à la 9ème classe, c’est là que j’ai été chaque année, pendant dix ans, pour apprendre tout ce que je sais. De midi à deux heures j’étudiais mes leçons. Et l’après-midi, j’aidais mes grands-parents.

Le samedi, c’était le grand jour des travaux aux champs. Je partais avec mes frères et les membres de ma famille pour aider à préparer les semis. Je bêchais, j’arrosais les plantations d’oignons qui exigent beaucoup d’eau et je récoltais les provisions hebdomadaires de manioc dont nous avions besoin. La terre était très fertile mais on n’utilisait pas d’engrais.

J’ai été élevée comme cela, simplement. Comme la plupart des enfants d’ici. Mon village dans la montagne n’avait ni eau, ni électricité. Le soir, nous nous éclairions avec une lampe à pétrole rudimentaire. Et le matin quand nous nous levions, notre nez était tout noir de suie !

Tu m’écoutes ?

Oui, notre nez était tout noir de suie !

Après les champs, on étudiait encore à la lueur de cette même lampe.

Parfois j’allais pêcher avec une simple baguette pourvue d’une ficelle à laquelle j’attachais un hameçon. Pour attirer les carpes jaunes, nous mettions à l’hameçon des boulettes de manioc ou nous creusions dans la terre pour trouver des vers.

Aujourd’hui, quand j’entends des cris d’oiseaux d’eau, je me souviens de ces moments de mon enfance, et je me souviens de mon village. En fait, rien n’a vraiment changé.
Regarde, me dit-elle, les enfants font toujours la file devant les puits. Et ce soir il n’y aura pas d’électricité dans la chambre !

Nous jouions avec des chiffons et des boites à conserve.

Ma maman est morte quand j’étais encore jeune. Et mon papa est mort quelques années plus tard.
Voilà l’enfance que j’ai eue. Nous étions douze à la maison, et après la mort de nos parents, mes frères et sœurs ont été partagés et hébergés dans la famille, comme cela se fait chez nous. Une tante qui avait des enfants à pris les trois filles. Donc je suis restée très proche de mes sœurs et ai perdu de vue tous mes frères.

Quand j’ai eu 18 ans, ma tante m’a fait comprendre qu’elle avait assuré mon éducation et rempli son devoir.

Ma grande sœur m’a abrité chez elle. Je devais surveiller ses enfants, faire la vaisselle…
Je me demandais ce que j’allais devenir…

J’ai appelé mon guide « Castor », parce qu’elle grignotait souvent des cacahuètes crues ou grillées, rongeait des biscuits ou tout ce qui lui tombait sous la main. (Si vous voulez en savoir plus sur le castor reportez-vous à l’article précédent été 2005 – Madagascar)